F de Richemond

Le 9 Juillet 1963, lors d'une semaine de permanence d'alerte en ALGERIE notre Constellation F-BAZJ commandé par le capitaine GIRAUD effectue un vol de routine vers Colomb Bechar à partir de Blida. Sur le chemin du retour,alors que si je me souviens bien nous survolions le massif de l'Ouarsenis, un appel de détresse nous est transmis.

Un des deux Skyraiders de la base d 'Oran en patrouille dans le secteur du Chott el Hodna tombe en panne de moteur et annonce qu'il va se poser sur le ventre.

Sitôt la position localisée approximativement, nous nous déroutons vers le lieu probable de l'accident,puis aprés qu'il ait eu lieu nous sommes guidés par l'autre appareil qui tourne en protection au dessus du crash. Bien que les hostilités soient terminées depuis plusieurs mois,on redoute qu'un mauvais sort puisse être réservé au pilote rescapé par la population locale probablement hostile de ce coin retiré.Avec l'aide précieuse du Sky, nous trouvons rapidement l'appareil accidenté. Heureusement il n'avait plus beaucoup de carburant et n'a pas pris feu en se posant sur le ventre comme cela arrive souvent en pareil cas. Nous autres observateurs remarquons tout de suite qu'un Skyraider n'est pas grand chose dans cette étendue désertique monochrome avoisinant les anciens lacs salés des grands chotts. De loin l'avion au sol au bout de l 'ornière laissée par son atterrissage est à peine visible et même de plus prés on ne voit pas bien sa forme.On le distingue surtout par la tonalité brillant métallisé de son fuselage et de ses ailes.Lors de notre premier passage (si je me souviens bien environ 20mns aprés le crash) le pilote se tient debout sur le capot et déjà plein de monde sorti de nulle part entoure l'avion. Lors de notre deuxième rotation il y a même une voiture! Ne sachant pas dans combien de temps l'hélicoptère de rescue arrivera les quatre observateurs reçoivent alors l'ordre d'ouvrir la porte et de nous préparer à envoyer(dropper et parachuter)une chaîne sater. En tant qu'observateur CC, je me désigne comme "portier" par un membre de l'équipage (dont je ne me souviens plus le nom) venu à l'arrière pour nous aider et nous diriger pour le largage. Il m'attache solidement et me longe court pour ne pas risquer d'être déséquilibré puis passer par la portière au moment de l'ouverture!aussitôt la porte ouverte, j'aperçois l'autre Skyraider qui continue à tourner au dessus de nous. A ce moment là je me souviens avoir entendu dans les écouteurs la voix du pilote qui annonçait qu'il allait décrocher. Commençant à être sèrieusement à court de carburant, il lui en restait juste assez pour rentrer à sa base. Ayant participé à deux exercices, je ne me souviens plus si nous avons ou pas éffectué ce largage. Il me semble me souvenir qu'un contre ordre est arrivé car l'Hélico de récupération était en route et que du coup ce largage n'était plus nécessaire.Laissant la porte ouverte,nous avons alors démonté la rampe de largage et rangé le matèriel.En attendant l'arrivée de l'hélicoptère notre Constel a alors continué à décrire de larges cercles passant à chaque fois en basse altitude au dessus du lieu du crash pour assister "moralement" le pilote rescapé. N'ayant plus la clim dans l'avion, je me souviens d'une bonne heure ou même deux d'attente vraiment éprouvante branlé dans les turbulences d'un air surchauffé dans la fournaise de la mi journée d'un mois de Juillet saharien! Sitôt l'hélico arrivé nous décrochons à notre tour et rentrons sur Blida.

EPILOGUE AMUSANT. Quelques semaines plus tard, lors d'une permission, alors que j'étais au mariage d'un de mes cousins dans les Cevennes, je rencontre parmi les invités un de mes cousins éloigné, jeune officier pilote de chasse récemment sorti de l'école de l'Air. Il s'agissait du capitaine Olivier BRILINSKI . Je lui explique alors que je fais mon service militaire dans l 'Armée de l'Air, que je suis observateur sur Constellation à la SAR et je lui raconte l'histoire de cette assistance d'un SKY sur le Chott el Hodna au mois de Juillet. Il écarquille alors les yeux dans un grand éclat de rire et me dit tout simplement "Eh bien ça alors! le monde est petit! l'autre Sky c'était moi!.. et je peux même t'avouer que j'étais tellement à court de carburant que je suis tombé en panne juste aprés m'être posé...j'ai dû me faire remorquer sur les derniers mètres pour rejoindre le parking!"

Francis de Richemond - Observateur